La mort des amants

Charles Baudelaire






Introduction

     Dans Les Fleurs du Mal, nous avons deux visions opposées de la mort : un aspect morbide ("une Charogne") et un aspect heureux ("La mort des amants"). Dans ce poème, Charles Baudelaire qui a connu l'infidélité en lui et hors de lui, la séparation et l'éloignement de la femme aimée dans le gouffre du temps imagine un monde idéal qui serait l'inverse du monde réel : la fidélité, la fusion, le luxe y règnerait. Comment Baudelaire passe d'une forme poétique traditionnelle, le sonnet, à des images plus modernes de la mort ? Et pourquoi peut-on dire que le poète se trouve entre antiquité et modernité ? Pour répondre à ces problématiques, nous verrons dans un premier temps la vision paradoxalement positive de la mort, puis dans un second temps, nous nous intéresserons à la forme et au thème traditionnels qu'a choisi Baudelaire pour son poème.

Lecture du poème

CXXI - La Mort des Amants

Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères,
Des divans profonds comme des tombeaux,
Et d'étranges fleurs sur des étagères,
Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.

Usant à l'envi leurs chaleurs dernières,
Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux,
Qui réfléchiront leurs doubles lumières
Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.

Un soir fait de rose et de bleu mystique,
Nous échangerons un éclair unique,
Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux;

Et plus tard un Ange, entr'ouvrant les portes,
Viendra ranimer, fidèle et joyeux,
Les miroirs ternis et les flammes mortes.


Annonce des axes

Etude

I - Une vision paradoxalement positive de la mort

- la mort n'est pas vraiment présente tout au long du poème : seuls le titre et le dernier vers en parlent. La mort est positive, même plus belle que la vie ("divans profonds comme des tombeaux")
- couleurs de la mort ' bleu et rose. L'adjectif "mystique" apaise le noir traditionnel de la mort.
- idée de remplissage ("plein d'odeurs") opposée à celle du néant, du vide. Les amants ne seront pas séparés ' emploi du pronom "nous" : c la fusion des amants, le duo d'amour.
- dans la mort, le poète conserve des sens et ses sensations alors que le corps est absent
- idée de retour à la vie : "fidèle et joyeux" (dernier tercet), "plus tard" ' perception de futur et de certitude "ranimer les flammes mortes"
- quelques indices montrent la différence de l'univers de la mort "étranges", et sa supériorité "des cieux plus beaux"

     Le passage à la mort est paradoxalement un retour à la vie, qui en plus est meilleur et plus beau que la vie… Mais comment Baudelaire reste-t-il aussi du côté antique ?


II - Tradition : le sonnet (forme) et l'amour platonicien (thème)

- au moins 100 sonnets dans Les Fleurs du Mal
- provient de l'Italie, importé en France au XVIème siècle, 2 quatrains et 2 tercets, rimes, forme et thème traditionnels.
- Baudelaire nous ramène en - 400 avec Platon et une conception de l'amour (néo) platonicien [le banquet]
      1er mot "nous" emploi des pronoms et des possessifs de la première personne.
      Présence du double :"nos deux cœurs", "réfléchiront leurs doubles lumières", "miroirs jumeaux".
- l'objectif est l'unique (v.10)
- opposition quatrains (double)/tercet (unique)
- idée de la fusion avec la chaleur, qui se produit dans un éclair
- dans les 2 tercets, on a paradoxalement l'idée de la vie "joyeux", "réanimer" et celle de la mort "les flammes mortes"
- on termine avec une chute paradoxale : on vient réanimer les flammes mortes, mais ça passe dans un sanglot chargé d'adieux.


Conclusion

    Nous avons vu que Baudelaire, en utilisant une forme et un thème traditionnels, parvenait à donner une idée positive et donc différente de la mort. C'est pourquoi ce poète se situe entre antiquité et modernité, en usant des deux pour créer ses textes. Dans "Les Fleurs du Mal", on a une deux visions de l'amour : l'idéal "La mort des amants" et le morbide "Les métamorphoses du Vampire". Nous nous trouvons donc face à une imagerie double de la mort, mais aussi une imagerie double de l'amour.




Retourner à la page principale !


Merci à Nahela qui m'a envoyé cette fiche...